Cette lecture te parlera peu si ton énergie est à plat. Si tel est le cas, prends soin de recharger tes batteries. Tu as probablement besoin de retrouver un minimum de jus pour résonner avec ce contenu qui traite de l’animalité en chacun. En même temps, il peut t’ouvrir – ou te rouvrir -une voie.
(Ce contenu ne traite pas directement de sexualité. Mais c’est en lien, évidemment.)
Quand ce que j’appelle « je » était enfant, je me réveillais souvent aux aurores avec un picotement en bas de mon ventre et de mon dos. C’était très intense, je ne pouvais l’ignorer puisqu’il me tirait du lit. Je me souviens rester assise dans le noir, et « sentir » dans mes os la vie animale autour. Ça faisait comme si mes cellules contenaient les oiseaux qui bruitaient dans les arbres, l’air du matin, la pulsation de la vie qui se réveillait. Je me souviens sentir un flux qui irriguait mon dos pendant que je conversais avec les oiseaux (façon de parler). Ça me donnait chaud. Je me souviens me sentir prête. Très prête. Ce picotement qui me tirait du lit, je le ressentais comme une urgence à vivre. J’avais très envie de vivre. J’étais excitée à l’idée de la journée qui s’annonçait (surtout l’été), et c’était un effort de devoir attendre que la maison s’anime. Je ne comprenais pas pourquoi cette lenteur, moi qui n’aspirais qu’à me dissoudre dans l’action immédiate. Tout tenter, tout créer, tout explorer. Je me souviens ne pas avoir peur de grand-chose, hormis de voir un être souffrir, ou de souffrir moi-même. Ne sentir que très peu de limites entre mes désirs et leur réalisation. Je voyais peu de problèmes, et beaucoup de possibilités.
Avec le recul, je réalise que j’ai passé tant d’années à négocier grâce à différents stratagèmes pour rester en contact avec cette puissance vitale. C’est simple, tout semblait avoir été mis en place pour la réprimer. Je rajouterais même, avec le recul, en particulier du fait que je sois dans un corps féminin. J’avais sans cesse la sensation que la famille, l’école et un certain nombre d’événements me tiraient loin de ce picotement intense et joyeux. J’ai négocié à m’en faire des nœuds un peu partout, surtout avec mon énergie qui inévitablement, déclinait. Mais je ne l’ai jamais oublié. Quelque part, je savais encore que la vie pouvait avoir un goût inimitable. Je le retrouvais à chaque occasion où j’avais très envie de quelqu’un ou de quelque chose. J’allais rajouter « physiquement », mais forcément non ? C’était déstabilisant, mais rassurant aussi. Je vibrais encore fort, quelque part dans les tréfonds. C’était bon.
En parallèle d’une vie conventionnelle, j’ai exploré cette vibration intensément. Je me suis dissoute dans des voyages, dans des soirées, dans des gens, dans des odeurs, dans des corps, dans des substances, dans le travail, dans l’épuisement, dans le brouhaha, dans le très chaud, dans le très froid. Dans beaucoup d’extérieur. Début 2013, j’étais arrivée à une situation de « réussite » extérieure très normée et je me suis effondrée intérieurement. Mes négociations avec la norme m’avaient créé tellement de nœuds dans la tête que la situation était devenue insoluble. Il est alors devenu intolérable de ne ressentir la vie que sur un tapis de yoga, lors d’un voyage exotique, d’un concert débridé, d’addictions ou tard dans la nuit avec quelqu’un que j’aimais. Je voulais la ressentir tout le temps. Tous les jours. Je n’ai plus toléré cette intermittence avec la vie.
Quand j’ai commencé à plonger entièrement dans la pratique du yoga ashtanga (à peu près au même moment), j’ai suivi un enseignant qui, un jour, racontait avec vivacité entrer dans le petit shala de Patthabi Jois à Lakshmipuram et démarrer ses Surya Namaskaras A. Il se souvenait sentir ses mains et ses pieds presser dans le sol et quelque chose se réveiller à l’intérieur de lui (note parallèle : la magie du travail des appuis. Fin de la parenthèse). Comme si c’était la première fois qu’il posait les mains sur la Terre. Il se souvenait revenir à la vie. Pratique après pratique. Au fil des milliers de pratiques. Redevenir proche de lui, puis agir en fonction, faire des choix différents. Proche de l’animal qui sent, qui sait, qui accueille la jouissance de la vie à l’intérieur.
Qui n’a plus de peurs (inutiles). Joyeux. Ouvert. Sensible. Fort.
Retrouver l’intrépide qui se risque. Inverser le rapport au danger.
Et à nouveau. Faire l’amour à la vie.
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Baptiste
Magnifique ton texte Flora ! Merci
FloraTrigo
Waou merci Baptiste, ça me réjouit de savoir que ça te parle. A bientôt !
Eugenio
Merci pour ce texte et tes magnifiques rappels que chaque matin nous avons 24 heures toutes nouvelles et fraiches devant nous et que nous sommes des animaux avant tout (+ou- conscients ) !
FloraTrigo
Ah mais joie de voir 2 hommes merveilleux (dont toi) commenter ce post. You rock Eugénio ! (rugissement lol)