Yoga. Ce besoin qu’on ignore.

Mercredi 2 septembre 2020, je suis allée pratiquer avec une de mes enseignantes pendant 2h. Je sais INTELLECTUELLEMENT que c’est une priorité dans mon emploi du temps. D’ailleurs, je place toujours ma pratique & mes propres stages avant le reste sur mon planning. [Note parallèle : si tu es un.e enseignant.e qui veut durer plus de 5 ans dans un état de santé viable, je t’invite à repenser à ce passage]. Je n’avais pas pratiqué en groupe depuis…ben des mois en fait ! L’année 2020 a pris un virage très rapide et inattendu pour tous. Donc je me rends à ce fameux cours, contente mais rien de plus. Et l’assise est prise, le groupe est merveilleux de présence, le chant d’ouverture démarre et là….je bascule littéralement dans une autre dimension. Le temps devient très dense tout en restant léger, le corps s’ouvre et devient de plus en plus large.

J’ai le sentiment d’être assise à l’arrière de moi-même et d’observer un monde intime de phénomènes. Ce qui est observé est très varié : ma respiration qui détend tout l’intérieur de mon être et s’aventure dans des compartiments jusqu’alors fermés, mon arrière de cuisse qui curieusement est capable d’étirement (qui l’eût cru hein), ma tête qui se demande si ce Sarvangasana va encore durer longtemps car c’est très très demandeur d’avoir les omoplates ainsi ascendantes. Mon cœur y réagit souvent très fort, mais j’observe, je respire, je tolère le travail. Dans 2 min, j’aurai oublié jusqu’aux passages les plus périlleux. Nous terminons allongés en repos sur quelques minutes que je vis comme des heures délicieuses. Sans pareilles. J’ouvre les yeux, je reviens au monde et me vis comme une enfant dont la détente n’a d’égale que la fraîcheur du regard. Je ne me sentais pas particulièrement mal en arrivant à la pratique, mais à chaque fois, elle me ramène à encore plus de vie. Encore plus de profondeur. Encore plus d’appréciation. Encore plus d’ouverture, de douceur et de calme. Ce calme qui prend place dans les tréfonds des cellules est d’une puissance indéboulonnable. Il est très difficile de le mettre en mots. Il se vit et se partage dans la seule présence avec ceux qui le vivent. Souvent, un regard suffit.

Je n’avais jamais identifié le besoin de pratiquer le yoga. Le besoin est né avec l’expérience et il a ensuite inondé tous les niveaux de mon être, jusqu’à devenir une évidence, jusqu’à devenir : ma vie. Le yoga est très loin de notre culture, ses représentants sont rares à être au niveau, et il prend souvent sa place de manière très maladroite et réductionniste au sein de nos environnements occidentaux. « Se tonifier, se muscler, s’étirer, de détendre ». Quelle est la différence avec du sport ou du stretching ? Encore un rapport externe au corps, non habité, pas assez aimé, coupé en morceaux. Et puis il y a le sacré vécu de l’extérieur, qui prend alors une tournure folklorique ridicule. On se dit « Namaste » sans l’avoir jamais fait vibrer dans son pays d’origine (Spoiler : le pays en question n’est pas la France).

Pour entrer en yoga aux côtés d’un.e enseignant.e sérieux.se, il faut laisser tout ce que l’on croit savoir avec ses chaussures, sur le seuil donc. Se centrer sur l’apprentissage méticuleux des techniques est un excellent point de départ. C’est mettre l’énergie au bon endroit. Les techniques sont un chemin de traverse, qui permettra l’accès aux ouvertures dont je parlais plus haut. Tout enseignement de valeur nous visse à la réalité et n’entretient ni les croyances, ni l’imagination. Les ouvertures sont réelles, elles s’installent dans la durée & ne déçoivent pas. Bonus : elles créent des relations de haute qualité qui nourrissent au-delà des mots.

Je vous souhaite une belle (r)entrée en yoga.

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