Probablement comme vous, j’ai été éduquée à la passivité et chose tragique, je n’en avais absolument aucune conscience. Ricanant durant des années au dernier rang de la classe, me reposant sur mes lauriers et endossant gaiement l’injonction de « s’asseoir et se taire », j’ai profité de certaines facilités pour traverser ainsi les 25 premières années de ma vie. Sous une vague apparence de réussite, je n’avais en fait aucune expérience de ce qu’était la véritable difficulté de la vie, l’engagement total. J’étais certes ponctuelle, je passais et réussissais mes examens, je faisais le nécessaire vital, mais j’étais bien loin d’obtenir les fruits auxquels j’aspirais profondément. Rappelez-vous, la vie est juste, et qui sommes-nous pour penser que nous sommes plus intelligents que quelque chose d’aussi large ? Lorsque j’ai commencé à chercher du travail, je râlais que Pôle Emploi ne me dédommage pas plus. Quand « j’échouais » à un entretien d’embauche, je me plaignais de la dureté du contexte économique. Quand je cherchais une activité de loisir, je prenais systématiquement la moins chère, raillant les autres qui « auraient pu faire » un effort pour les demandeurs d’emploi. On en chiait après tout, merdeeeee. Je ne voulais rien payer et tout avoir.
Lorsqu’on se rend en Inde pour se dédier au yoga, l’on est très rapidement recadré(e). L’enseignant(e) ne porte nécessairement pas grande attention à un(e) énième élève venu(e) d’on-ne-sait-où. J’ai fait plusieurs séjours durant lesquels je me levais à 4h15 le matin, pratiquais plusieurs heures, donnais des litres de sueurs et revenais sans qu’on m’ait appris la moindre nouvelle posture ou pranayama. Après avoir dépensé toutes mes économies bien évidemment. D’autres nationalités (Américains Italiens, Anglais…) chez qui le yoga ashtanga était plus mûr semblaient trouver ça totalement normal. Nous ne sommes pas des consommateurs, mais des élèves. Mon esprit « français originaire de classe moyenne » achoppait fortement sur ce point et voulait coûte que coûte « en avoir pour son argent ». Ne voyant pas au passage, tous les bénéfices que je tirais d’une pratique régulière au niveau énergétique. Le verre à moitié vide ? Une vieille habitude.
Ce mental prétentieux qui pense qu’on lui doit, m’a menée à un sentiment quasi-permanent d’ingratitude et de mécontentement. Une vie de merde quoi (je me permets car c’était la mienne après tout). C’était devenu une seconde nature que je projetais ardemment sur des causes sociétales un peu perdues. Une thérapie, de multiples séminaires de développement personnel et des années de pratique quotidienne du yoga ashtanga plus tard, le paysage intérieur s’est heureusement transformé. Au commencement, il y eut Natalie Portman. Interviewée par un journaliste, l’actrice passait son temps à dire « merci » pour tout ce qui lui arrivait d’opportunités professionnelles. Quelque chose sonnait juste. Puis je me suis mise à observer les gens qui réussissaient (à mon sens). C’est-à-dire qui réussissaient à faire ce qu’ils souhaitaient. Tous remerciaient pour ce qui leur arrivait. L’idée que cela fut même possible me semblait à la fois louche, excitante, et effrayante. A-t-on vraiment ce pouvoir sur sa propre vie ? Étaient-ils mieux lotis que d’autres au départ ? L’expérience montrait que non.
La pratique du yoga implique de lâcher dès le démarrage un certain état d’esprit attentiste. En l’occurrence, l’état d’esprit du consommateur, attendant après les tous premiers cours de yoga les fruits de l’effort qu’il a bien daigné produire, satisfait ou remboursé. Autant vous le dire de suite, passez votre chemin dans la seconde, vous ne trouverez rien de tout ça dans la véritable pratique qui transforme. Pensez-vous vraiment qu’après 20 ans à négliger une colonne vertébrale, vous puissiez espérer guérir le problème en quelques heures de pratique ? Allons. Souvent, le virage mental s’opère quand les personnes commencent une pratique quotidienne. Après une semaine, déjà les premiers retours affluent : « c’est normal d’avoir mal « partout » ? c’est normal de ne pas avoir envie de se lever ? c’est normal de cogiter autant durant la pratique ? » Réponse : oui, tout est normal, bienvenue dans les prémices de l’observation. Ne ternissons pas le tableau, les bénéfices sont ÉNORMES. Mais souvent, notre mental négatif se centre uniquement sur ce tiraillement dans l’avant du mollet. Le verre à moitié vide ? Une vieille habitude décidément tenace.
Dans leur dernier essai Essential, The Minimalists écrivent : « Nous venons au monde créateurs, curieux de découvrir des manières de nous exprimer visuellement, auditivement, corporellement » (p. 244, j’ai traduit). À quel moment est-on passé du statut de créateur de sa vie, à celui de consommateur ? À quel moment a-t-on commencé à ancrer en soi la croyance que si l’on s’impliquait peu, on allait quand même obtenir beaucoup de satisfaction ? Sur un malentendu ? Sérieusement. Bonne nouvelle cependant, il existe au niveau mondial une large communauté de gens libres (pas uniquement dans le yoga), qui ont décidé qu’ils retrouveraient le chemin de la création de leur propre vie. Avec les outils modernes et quelques balbutiements d’anglais, il est possible de contacter des gens PHÉNOMÉNAUX, sources d’inspiration qui nous élèvent. Point commun entre tous ? Ils ont aligné leur vie avec leurs valeurs et pour ça, ont souvent changé de cap radicalement, ont pris des risques. Ils sont très engagés dans leur travail/activité/création, ne comptent pas leur temps et vivent simplement (chacun à sa manière a simplifié sa vie, il ne s’agit pas de vivre sans meubles !). Ils expriment fréquemment une sincère gratitude pour la qualité de leur vie.
Mettez la lumière sur votre relation à l’argent et vous apprendrez infiniment sur votre relation au monde et à vous-mêmes. Est-elle teintée de peur ou d’insécurité ? Pourtant si vous regardez en arrière, vous avez toujours réussi à payer vos factures. C’est donc bien de votre peur et votre insécurité dont il faut s’occuper. Est-elle teintée de rétention, de tension ? D’envie ou de frustration ? Les tableaux sont à la fois variés, et à la fois tellement classiques. Sans jugement de valeur, observez…donnez-vous en ressentant de la joie ou en freinant des 4 fers ? Donnez-vous en attendant quelque chose de l’autre ou sans plus y penser après ? Comprenez bien que l’argent n’est rien, mais révèle beaucoup de choses. Et comprenez également que c’est vous qui créez le paysage financier de votre vie. De la même manière que vous créez vous-mêmes votre pratique de yoga en choisissant de suivre un/des enseignants, en vous posant une discipline de pratique qui soutienne le reste de votre vie, ou en ne faisant rien de tout ça. The Minimalists toujours : « Nous avons beaucoup plus de chance d’augmenter notre niveau de contentement en changeant juste nos habitudes – en formantde nouveaux rituels quotidiens qui nous donnent de la puissance– et nous n’avons pas besoin de grosses sommes d’argent pour faire cela. Revenu élevé ou non, nous devons simplement éviter la passivité à la faveur de tâches actives, engagées, réfléchies » (p. 95, j’ai traduit). Le verre à moitié vide ? Une vieille habitude…dont il est possible de sortir.
En tant qu’ancienne pauvre, la pratique du yoga a mis la barre très haut mais m’a finalement fait voir ce que je ne VOYAIS PAS mais qui était là depuis le départ. Nous sommes infiniment riches de ressources intérieures. Et ce sont uniquement ces ressources-là qui, cultivées, vont faire la différence et fleurir après quelques années en un paysage de vie (y compris financier) qui nous correspond. On a besoin de peu, un corps, une respiration, un mental pour opérer cette transformation engageante : « C’est ce flux sans effort, aisé qui vous mène à toutes les choses auxquelles vous aspirez. La guidance intérieure vient de notre partie la plus haute et nous parle sous la forme de sentiments, de prises de conscience et de savoir intérieur » (p. 65, Creating money).
Alors ancien ou nouveau pauvre, ancien ou nouveau riche, la seule question qui vaille vraiment est celle-ci : êtes-vous décidés à transformer vos intentions en actions concrètes dont les fruits ne seront pas immédiats ? À garder confiance pendant les moments de doute ? « Parce qu’il n’existe rien de plus puissant qu’un état dynamisant » écrit Anthony Robbins (p. 81, Pouvoir illimité) et que « Vous avez la même quantité de temps que n’importe qui qui a déjà créé un chef-d’œuvre » (p. 260, The Minimalists, Essential ; j’ai traduit). Et comme le dit Rage Against The Machine : « Take the (real) power back.
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