Comme la plupart de mes congénères occidentaux, je souffre plus ou moins consciemment d’un symptôme assez récurrent : je ne m’aime pas assez. Je fais encore trop souvent passer les tâches extérieures avant mon équilibre intérieur. Et me voilà à nouveau entraînée dans des pensées du type : « quand la maison sera rangée, quand la compta sera à jour, quand la panière de linge sera repassée, quand ceci, quand cela« . Alors à ce moment-là seulement, je pourrai prendre du temps pour moi, me détendre etc. A ce moment-là, j’aurai le droit. Question : mais pourquoi ça ? Dans le fond de mes cellules et de ma psyché, je reste encore conditionnée, persuadée que j’ai quelque chose à donner, à prouver afin que ma valeur dans ce monde soit vraiment légitime. Je dois mériter. Je ne m’autorise pas de manière inconditionnelle. Cette empreinte est si forte & profonde que j’en suis la première étonnée, je pensais vraiment avoir avancé là-dessus (c’est-à-dire lâché) ! Aujourd’hui j’ai décidé d’en faire un partage avec vous : le temps que l’on se donne, c’est de…l’amour. C’est une chose fondatrice, fondamentale. En pratique, ça veut dire que ça doit constituer une fondation dans l’organisation du reste de notre vie. On bâtit dessus. C’est incontournable, on ne peut pas faire l’impasse. Comme la respiration en yoga, ce n’est pas accessoire, c’est la chose première, la base. Ce partage est donc une réflexion sur le temps, l’amour, de soi, des autres, la vie, la recherche de la qualité dans toute chose. Cesse de faire l’enfant et donne-toi.
Hier j’ai démarré la journée de la pire manière qui soit : je suis partie très tôt et sans manger faire 2h de ménage dans mes locaux professionnels, puis j’ai enchaîné avec 3h de ménage chez moi et un peu de cuisine. J’avais été occupée la veille par l’organisation du goûter avec les élèves de yoga, et rien n’était en ordre dans ma vie personnelle. À 13h30, devant mon déjeuner, j’étais quand même soulagée d’avoir remis de l’ordre mais un peu dépitée de voir que 2h après j’enchaînais avec ma journée à mon cabinet. Où étais-je dans l’histoire ? Je m’étais perdue en cours de route semblait-il. À mesure que je mangeais, mon regard s’est alors tourné vers mon chat. Je me suis mise à l’observer. Je veux dire, à l’observer…vraiment. Ces moments où tout à coup un voile se lève et on se met à voir les choses « pour de vrai » comme disent les enfants. Depuis que j’étais rentrée, elle avait enchaîné plusieurs activités : jouer avec une ficelle, faire des roulades au soleil, humer l’air extérieur depuis le balcon, boire de l’eau, miauler quand j’ai ouvert le frigo. Son regard était brillant, son allure intrépide et elle respirait la gaité et le dynamisme. Elle était en pleine forme, n’avait pas chômé, prenait du plaisir et ça ne lui posait vraiment aucun conflit intérieur ! Et moi assise là, dans ma posture fatiguée…ça ne ressemblait à rien franchement. M’est apparue alors clairementl’absurdité de la situation dans laquelle JE m’étais mise ! Toute seule, comme une grande, attendant peut-être qu’une fée fasse apparaître un bain chaud, un massage et reporte mes rdv professionnels !
Je me suis alors mise à contempler comme je n’avais jamais contemplée jusque-là la phrase suivante : « PRENDS – TON – TEMPS ». Prends le temps. Le temps est à toi. Ta vie est à toi. Prends ce temps. C’est actif, c’est à toi de prendre, de créer. Dans son livre « L’art difficile de ne presque rien faire », l’auteur féru de chats Denis Grozdanovitch écrit : « et si le temps gagné par l’entremise de la vitesse était inutilisable pour le bonheur ? » (p. 98) Alors…c’est ce que j’ai mis en pratique. J’avais 2h, et j’ai décidé que je chérirai chaque minute, que ses 2h seraient les miennes comme jamais. Téléphone en off, j’ai commencé par regarder une vidéo qui parlait de méditation Vipassana sur You Tube parce que ça me faisait plaisir, puis j’ai écouté à fond Césaria Evora tandis que je jouais avec le chat et nous avons pris du plaisir. J’ai pris ma douche (il n’est jamais trop tard !) en chérissant chaque geste, j’ai mis un tea-shirt fushia, un bracelet multi-colore car ils me faisaient plaisir...j’ai choisi d’honorer ce corps qui m’est donné. Toutes ces possibilités d’être vivant(e). J’ai choisi de faire honneur à la vie, qu’elle ne soit que beauté, joie, respiration, musique. Et devinez quoi ? Je suis finalement allée travailler et le travail avec les patients s’est vraiment très TRÈS bien passé. Plus je lâche, plus ils avancent. Chaque semaine. C’est incroyable. J’ai fermé les lieux le sourire aux lèvres en chantonnant « Petit pays, je t’aime beaucoup, lalalala ».
Honore la vie. Prends ton temps. Fais toi plaisir. Sois grand(e). Sois actif. Partage. Aime. Toi. Les autres. C’est la même chose. Si tu ne le fais pas, qui va le faire à ta place ?
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